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Des plans de cuisine qui rendraient malade ?

Des plans de cuisine qui rendraient malade ?

Ils équipent nombre de cuisines modernes et design. Les plans de travail en quartz de synthèse, blancs ou colorés, sont à la mode et font la fortune de leurs fabricants. Mais dans les usines qui les produisent, plusieurs ouvriers tombent malades, voire décèdent. En cause : la silice et les nombreux produits chimiques — cancérigènes et perturbateurs endocriniens — présents dans ces agglomérés, qui intoxiquent les employés et menaceraient même la santé des particuliers cuisinant sur ces plans de travail. Un dirigeant d’entreprise et des ouvriers lancent l’alerte. Enquête.

« Ses poumons étaient un vrai gruyère. » Paqui Silva a les cheveux rouges et la voix rauque. Par moment, le rythme de ses mots ralentit. Sa voix s’abaisse et se charge d’une légère émotion. Son mari est mort il y a trois ans d’une silicose. Il a vécu une lente descente aux enfers à partir de la découverte des premiers nodules aux poumons, en 2002. « Les médecins lui ont dit, en 2004, que son poumon gauche avait des trous partout, raconte sa femme. Le droit était déjà malade. En 2013, ils lui ont annoncé qu’il n’y aurait pas de transplantation, ni de nouveaux traitements, mais seulement le temps que Dieu lui donnerait. » Paqui a quitté son travail pour l’accompagner. Une valise était toujours déposée à l’entrée de leur maison, au cas où ils devraient partir en urgence à l’hôpital de Grenade, en Andalousie. Là-bas, elle a dormi de nombreuses nuits sur une chaise d’hôpital, à ses côtés. Dieu leur a donné deux ans.

La silicose était une maladie répandue chez les mineurs exploitant le charbon. José Araque Martinez, lui, travaillait dans une usine du groupe espagnol Cosentino, un des leaders mondiaux de la fabrication des plans de travail en quartz de synthèse pour cuisine. Huit anciens ouvriers de cette entreprise seraient morts des suites d’une silicose. Une quarantaine d’autres seraient aujourd’hui malades. Ailleurs en Espagne, mais aussi en Israël ou aux États-Unis, des centaines d’ouvriers de plusieurs entreprises sont concernés. Ils ont tous un point commun : l’inhalation au travail de poussières extrêmement fines qui entraînent la destruction progressive et irréversible d’une partie de leurs poumons. Tous ont travaillé à la fabrication de plans de travail pour cuisine en quartz de synthèse.

« On a connu le scandale de l’amiante. J’ai décidé d’arrêter de commercialiser le quartz de synthèse »

Sur quatre étages se dévoilent des agencements de salles de bain et de cuisines créées à partir de marbre et de granit. Le « showroom » de Pont-L’Êveque, situé à quelques kilomètres de Deauville, en Normandie, est luxueux ; les prix sont réservés à des clients aisés. Jusqu’à il y a trois ans, ce marbrier proposait des plans de travail de cuisine en quartz de synthèse. « C’était à la mode. Le client voulait un plan de travail blanc ou de la couleur, on pouvait le faire, indique Philippe Ledrans, le dirigeant de la société MDY. On pouvait exploiter la matière comme on voulait. C’était génial pour nous. Le quartz de synthèse représentait 55 % de notre production. »

Mais les ouvriers de MDY commencent à tomber malades. Des maux de tête, des vomissements, des malaises... « Un jour, mon chef de finition vient me voir avec tout l’atelier et me dit : quand on travaille des cuisines comme celles-ci, on n’est pas bien », relate Philippe Ledrans. Les ouvriers portent des masques, des lunettes, des gants, des suppresseurs d’air, des scaphandres… Pourtant, les arrêts de travail se multiplient. Philippe Ledrans questionne l’entreprise Cosentino, qui leur fournit la matière brute. « Le représentant m’explique que c’est une réaction psycho-somatique de mes ouvriers, à la vue de la tête de mort inscrite au départ sur les produits. »

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